Des bardeaux et des tuiles

A 15 minutes de l’Ermitage du Rebberg)

À La Broque, la prévention contre les incendies a eu un résultat curieux.

Dans le deuxième quart du XIXe siècle, la fréquence et la violence des incendies dans la commune de La Broque devient franchement préoccupante. Par moments, ceux-ci menacent même les maisons de Schirmeck, juste de l’autre côté de la Bruche, à cause des flammèches poussées par le vent.

« Ces incendies deviennent si fréquents qu’on ne sait que penser », écrit-on en 1832. Assurément, on peut songer à de la malveillance. Quand la maison de l’appariteur Denis a brûlé, en été 1832, ne s’est-on pas rappelé que, la veille, il avait été menacé par un mendiant ? Mais l’imprudence aussi provoque des catastrophes : chez l’industriel Malapert, en 1835, un domestique a bêtement déposé des cendres mal éteintes sur un plancher.

La commune se met à la prévention

Quelle que soit leur cause, les incendies seraient moins violents si les maisons, dans leur ensemble n’étaient pas couvertes de bardeaux, ce qu’on appelle « essis » dans les Vosges, « Schindle » en Alsace et « hhonns » dans la Haute-Bruche. Souvent aussi, on protège avec des bardeaux ou des planches la façade la plus exposée aux intempéries.

La commune se met à la prévention et commence par les cheminées. À partir de 1836 au plus tard, on fait appel à un ramoneur. L’année suivante, on le fait accompagner par un architecte pour constater quelles cheminées sont dangereuses. Les propriétaires doivent alors les modifier. Parallèlement, pour mieux lutter contre le feu, on améliore le matériel des pompiers. On augmente le nombre des fontaines, qui étaient trop rares à Fréconrupt et à La Claquette.

Entre 1830 et 1840, on se livre à une campagne pour amener les gens à remplacer leurs bardeaux par des tuiles. Encore faut-il que la charpente en supporte le poids. La commune ne recule pas devant un sacrifice : elle offre le bois nécessaire à ceux qui veulent bien modifier leur couverture.

On ne tarde pas à s’apercevoir que certains demandent le bois sous prétexte qu’ils veulent poser des tuiles, mais que la maison reste comme elle était, car ils le vendent ! C’est au point que le maire songe à les traduire en justice. Même des habitants qui ont subi un incendie se mettent à spéculer et revendent le bois supplémentaire qu’on leur a fourni pour reconstruire avec des tuiles.

Bizarrement, depuis qu’on essaie de promouvoir celles-ci, les sinistres se multiplient. En 1853, la commune décide de ne plus délivrer beaucoup de bois pour la reconstruction des toits brûlés et le maire, désabusé, note non sans un certain cynisme : « Si une fois on remarque qu’il y aurait de la perte à être incendié, j’ai lieu d’espérer qu’on n’en parlera plus que bien rarement en cette commune » !

D’après Marie-Thérèse Fischer,  publié le 04/12/2013 dans les Dernières Nouvelles d’Alsace.

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