Des informations inquiétantes sont parvenues jusqu’aux préfets des Vosges et du Bas-Rhin.

Décidément, 1848 est une année riche en péripéties. En février, une révolution a balayé la royauté en provoquant l’abdication de Louis-Philippe. Des mesures sociales ont été prises à Paris, comme la création des ateliers nationaux. Mais les élections ont mis en minorité les républicains avancés. La suppression des ateliers nationaux suscite dans la capitale une insurrection telle qu’on fait appel à la troupe pour la mater.
Les villages bruchois se trouvent bien loin de tous ces troubles, n’est-ce pas ? Pas sûr… En juillet, un industriel de Saint-Dié signale au préfet des Vosges « l’arrivée d’une bande de malfaiteurs dans la forêt de Framont ».
Deux bandes armées aperçues dans la forêt
Le juge de paix de Schirmeck est averti de la présence, dans cette forêt, d’une vingtaine d’individus suspects, voire de soixante-cinq. L’information arrive même chez le préfet du Bas-Rhin : « Maintenant que les ateliers nationaux sont dissous et que les anarchistes sont traqués dans les environs de Paris, ils se répandent dans les Départements. Deux bandes armées ont été aperçues dans la forêt de Framont. Quelques-uns qui s’étaient détachés de la bande ont pris des informations auprès des bûcherons sur la Garde Nationale de Schirmeck, sur le nombre d’hommes qui la composent, sur la quantité d’armes qu’elle possède, sur les personnes aisées de la localité, sur les établissements industriels, leur importance, le jour de la paie, etc. Pour nous préserver d’une invasion de la part de ces brigands, on a établi des postes de garde nationale sur toutes les routes qui aboutissent à Schirmeck et toutes les nuits on fait circuler une forte patrouille. Si cet état de choses devait se prolonger, l’on ferait des traques dans les forêts. »
Le bruit se répand dans le Val de Villé que des bandes d’insurgés se sont réfugiées dans les forêts du canton de Schirmeck. Des hommes de la garde nationale de Villé sont envoyés dans la vallée de la Bruche et enquêtent chez tous les maires. Celui de Fouday met une voiture à leur disposition pour se rendre plus aisément à Rothau et Schirmeck. Celui de Rothau leur donne un certificat attestant que ces rumeurs sont sans fondement.
Les résultats de l’enquête rassurent tout le monde : « Les individus que l’on disait être des émeutiers réfugiés de Paris n’étaient que des ouvriers sans travail auxquels l’administration forestière avait confié l’exécution d’une route dans la forêt de Framont pour les empêcher de se livrer à des délits dans cette même forêt, lesquels ouvriers s’étaient empressés de venir porter secours à l’occasion d’un commencement d’incendie de cheminée qui avait éclaté chez le maire même de Schirmeck. L’individu qui avait prévenu le juge de paix a été interrogé de nouveau par ce magistrat et a fini par dire qu’il n’avait fait qu’une plaisanterie ».
Comme l’écrit un sous-commissaire vosgien : il y avait là plus de stupidité que de malveillance !
D’après Marie-Thérèse Fisher, paru le 11 février 2015 dans les Dernières Nouvelles d’Alsace.