(A 25 minutes de l’Ermitage du Rebberg)
La guerre des paysans, en 1525, n’était pas seulement un soulèvement de pauvres cultivateurs.
Les historiographes lorrains avaient tout intérêt à employer un terme péjoratif pour désigner les troupes écrasées par le duc Antoine de Lorraine au printemps 1525. C’est dans leur sillage qu’on emploie souvent en français l’expression « guerre des rustauds ».
En fait, « guerre des paysans », plus neutre, semble plus approprié. Car il ne s’agissait pas d’une révolte de rustres faméliques, mais d’un mouvement plus ample aux origines très complexes et qui a embrasé tout le sud-ouest du Saint Empire. Les revendications économiques et politiques étaient sous-tendues par les idées en lien avec la Réforme. Toutefois, Luther a condamné cette révolte en termes clairs.
Une charge officielle
Dans les rangs des prétendus « rustauds », on trouve aussi des bourgeois, des membres de corporations urbaines. Le bras droit d’Érasme Gerber, leur « général », est un ancien « Schultheiss » ou « écoutète » de Rosheim, donc quelqu’un qui a exercé précédemment une charge officielle, à caractère judiciaire, dans une ville de la Décapole. Pas précisément un pauvre hère qui gratte un lopin de terre ingrat…
On peut lire le nom de ce personnage sur une fresque à Rosheim : Ittel Jörg.
Qu’est-ce qui l’a poussé à embrasser cette cause ? On dit qu’il avait été évincé de sa charge et souhaitait se venger. Il peut avoir eu une foule d’autres raisons. En tout cas, nous le rencontrons avec Érasme Gerber à l’abbaye d’Altorf, que leurs hommes ont envahie et mise à sac. Selon une chronique de l’époque, il aurait été particulièrement actif dans le pillage de l’abbatiale de Haslach, dont il aurait contribué à extraire la châsse de saint Florent pour en envoyer le métal précieux à la fonte.
Lorsque l’armée paysanne entre dans Saverne, c’est sous la conduite d’Érasme Gerber et d’Ittel Jörg. Mais la cité conquise se transforme pour eux en souricière : le 17 mai, le duc Antoine attaque la ville et parvient à y pénétrer. L’arme au poing, ses soldats ne font pas toujours la différence entre révoltés et habitants, se livrant à un terrible massacre. On arrive à mettre la main sur Gerber, qui sera exécuté par la main de son propre barbier, lequel mérite ainsi d’avoir la vie sauve. Cette fois, Ittel Jörg s’est désolidarisé : il a pu s’enfuir, de même qu’un moine défroqué et deux autres chefs.
Malheureusement pour lui, il tombe plus tard entre les mains des Strasbourgeois. Le 3 juin 1525, il sera décapité selon les uns, écartelé selon les autres. À vrai dire, les deux ne s’excluent pas. On a des exemples de condamnés qui ont été d’abord mis à mort, puis coupés en quatre, et leurs « morceaux » exposés séparément à différentes entrées de la ville pour dissuader qui conque serait tenté de les imiter.
Ce procédé morbide était-il vraiment efficace ?