Les torches de la Sainte-Odile

(A 25 minutes de l’Ermitage du Rebberg)

Au Moyen-Âge, la grande fête du pèlerinage comportait pour certains des obligations très particulières.

Un homme à qui l’approche du 13 décembre doit causer du stress, au XIVe siècle, c’est le « Meiger » de Rosheim. En français, on l’appelle « maire », mais il n’est pas exactement un bourgmestre. Nommé par l’abbesse de Hohenbourg, il exerce ses responsabilités dans le cadre de la colonge, une structure juridique rassemblant les cultivateurs du lieu sujets de l’abbaye, avec leurs devoirs et leurs droits, clairement définis par une constitution écrite.

Ceux dont les torches auront été reconnues non conformes sont condamnés à une amende

Un autre doit déjà prévoir la fête longtemps avant : le Schultheiss, un officier seigneurial également choisi par l’abbesse, et qui réside sur la montagne. Ladite montagne a d’ailleurs encore d’autres habitants, car, selon le « livre salique », elle « est dans ce droit de tout temps que dix hommes doivent y demeurer. ».

Ceux-ci, au mois d’août, sous la surveillance et suivant les indications du messager de l’abbesse, se rendent dans la forêt de Barr ou celle d’Obernai pour y couper chacun cinq torches de bois de bouleau. Elles doivent mesurer neuf pieds de long (environ trois mètres) et il faut que leur extrémité la plus mince ne soit pas inférieure à ce qu’un homme peut entourer de ses deux mains. Le Schultheiss, de son côté, est tenu de fournir dix torches.

Pour la peine, ils ont droit, de la part de l’abbesse, à un pain de seigle chacun — deux pour le Schultheiss —, dont la dimension est déterminée ainsi : si un homme en pose une extrémité sur son pied, l’autre extrémité doit dépasser son genou de telle sorte que, si on la coupe, on ait largement de quoi s’en rassasier ! Avec cela, une mesure de vin.

Voici la Sainte-Odile ! Le « Meiger » est monté à Hohenbourg et loge chez le Schultheiss, qui est obligé de l’héberger une nuit et de lui servir du rôti et du bouilli. Son cheval reçoit une botte de paille et une mesure d’eau, ainsi que du fourrage.

Le « Meiger » aide les autres officiers à faire le service d’ordre parmi les pèlerins, surtout pour éviter les incendies ou autres nuisances. Lorsque les torches sont livrées, il vérifie leurs dimensions. Avec la moitié d’entre elles, on allume un grand feu dans les parages de la chapelle Saint-Pierre.

Cinq des torches du Schultheiss sont réservées au « plaid » du 14 décembre, une assemblée à caractère judiciaire, présidée par le maire. Ceux dont les torches auront été reconnues non conformes à l’inspection sont condamnés à une amende. De même, les fermiers en retard dans le paiement de leur cens. On juge les divers délits forestiers et autres commis pendant l’année. Et le maire vérifie les poids et mesures en usage sur la montagne.

Précisons que la séance se déroule en plein air… De quoi rentrer avec un bon rhume, malgré les torches !

D’après Marie-Thérèse Fischer, publié le 11/12/2013 dans les Dernières Nouvelles d’Alsace.

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